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sábado, diciembre 29

Brassens, dessus dessous I



(Extrait d’un article de Gilles Médioni à L’Express du 16e Mars 2011)
La moustache, la pipe, les polos et Les Copains d'abord... Derrière ces images qui perdurent se cachait un homme sportif, élégant, cinéphile, amoureux des belles-lettres.  

[…]Brassens est un cinéphile averti, amateur des chefs-d'oeuvre du muet, de westerns - tout jeune, il en avait même réalisé un avec un âne -, des polars des années 1950, des Maigret et des films avec Lino Ventura, Jean Gabin ou Bourvil. L'esprit de Charlie Chaplin a laissé des traces en lui; ses chansons sont des courts-métrages burlesques joués par des personnages récurrents. « Je dois te remercier de te servir de Chaplin dans ta comparaison », écrit-il à son ami Roger Toussenot, « et aussi d'avoir vu quelle influence a exercée sur moi le rythme saccadé et poétique du cinéma muet. »
Rattrapé par la célébrité, qui l’empêche de sortir, Brassens fait venir le 7e art à domicile. Il s'achète un projecteur 16 millimètres et montre la série des Fantomas à ses amis. Puis fait l’acquisition, en plusieurs exemplaires, des premiers magnétoscopes. C'est un passionné de high-tech qui craque pour les chaînes hi-fi, les machines à écrire IBM â boule ou les Walkman. 

Jeune homme, Brassens s'habille à la façon des grands séducteurs américains, comme Cary Grant. Puis il entre dans sa période bohème: pantalons de velours et cols roulés synthétiques achetés sur le catalogue Manufrance. À chacune de ses tournées, il commande à son tailleur, rue Daguerre, à Paris, « deux costumes qui font déjà vieux ». Qu'il porte avec chemise blanche et cravate noire. «Je ne voudrais pas que l'on pensât que je suis un vieil anar qui se déguise pour aller en scène », précise-t-il. « Alors j'aime mieux me déguiser dans la tenue réglementaire. »

«Aujourd'hui, quand je revois ses photos », confie Agathe Fallet, l'épouse de l'écrivain René Fallet, grand ami de Brassens, « sa ressemblance avec Orson Welles jeune me frappe. Une même force de la nature aux traits délicats. Mais Georges avait, en plus, cette légère coquetterie dans l'œil ». 

Un jeune professeur, Alphonse Bonnafé, initia Georges Brassens à la littérature : « À 14 ou 15 ans, on était des brutes et on s'est mis à aimer les poètes. Tu mesures le renversement? », confie-t-il à son ami André Sève. L'amour des livres et des écrivains ne le quittera pas. Une photo de Léautaud est même glissée dans son portefeuille. Brassens fait recouvrir les livres de sa bibliothèque de couvertures de couleurs différentes pour les reconnaître : la poésie en marron, la philosophie en noir, etc.
« Il y a chez lui, comme chez Albert Cohen ou Jean Giono », explique Joann Sfar, « cette idée d'une culture des belles-lettres. Brassens est un mélange de grand érudit et de facteur Cheval. » 

« Quand il rencontre des personnes avec qui il pense s'entendre, ajoute Clémentine Deroudille, il leur offre des livres comme des passeports pour l'amitié : Mon oncle Benjamin, de Claude Tillier, Le Bachelier sans vergogne, d'Albert Marchon, les Fables de La Fontaine. » Ètre son ami, c'est partager son goût du verbe. 

Dans le « bunker » qu'il s'est aménagé rue Santos-Dumont, à Paris, Georges Brassens possède une collection impressionnante de 33-tours. Sur les étagères figurent en bonne place ceux de Charles Trénet, qui l'a influencé, d'Elvis Presley, de Johnny Hallyday, de Claude François et du jazz qui l'a fait naître à la musique. Le jazz lui rendra d'ailleurs le compliment : Sidney Bechet et André Revéliotty sont les premiers à enregistrer en version jazzy Brave Margot et La Cane de Jeanne.
Brassens déteste la musique classique et dit lui « préférer le bruit du rasoir électrique ». Sa maison de disques, Philips, lui faisait parvenir tous les vinyles des poulains de la variété française. C'est ainsi qu'il programme - entre autres - Yves Simon en première partie d'un tour de chant à Bobino alors que le premier album du chanteur n'est pas encore sorti.